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Anakot Angkor

25 septembre 2007

Nakrie et Maknie Pen

Nous sommes heureux d'accueillir au sein de l'ONG Nakrie et Maknie pour un stage avant la reprise des cours.

Nakrie fait actuellement des études d'agronomie à Phnom Penh et elle espère pouvoir intégrer l'Agro en France à la fin de ses études au Cambodge. Elle est chargée d'aider notre président Yam Djé sur les plantations d'Aloès. Son objectif, rédiger un document concret et pédagogique sur la culture de l'Aloès. Nakrie prépare aussi un saisonnier sur les fruits du Cambodge afin de nous permettre d'obtenir les meilleurs fruits et les meilleurs prix auprès des producteurs. Nos confitures sont faites exclusivement avec des fruits cambodgiens.

Maknie fait des études de français. Elle doit choisir une spécialisation à la fin de l'année, tourisme, enseignement, etc. Elle a aidé Sophie dans les démarches commerciales mais surtout va rédiger pour notre rubrique La vie quotidienne au Cambodge plusieurs textes pour compléter ceux d'Eric.

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20 septembre 2007

Anne Rolland

Anne Rolland, chef de projet d'Anakot Angkor a décidé à nouveau de changer de vie. Après 18 ans chez KPMG en tant qu'auditeur financier et chef de projet, elle avait choisi de passer son CAP de cuisine à l'école Ferrandi pour devenir auteur & photographe culinaire.

Une rencontre avec le Cambodge en 2005, l'avait décidé à aider l'année suivant, Anakot Angkor pour mettre au point la recette du gingembre confit. Et surtout à rejoindre l'ONG en juin 2007 pour 4 mois.

Son arrivée a coincidé avec le début de l'atelier de confiseries (confitures & confiseries), la mise en place des outils financiers et administratifs ainsi que la création du blog d'Anakot Angkor.

Elle a choisi de poser définitivement ses valises au Cambodge en ouvrant d'ici la fin de l'année un restaurant La maison bleue.

Anne continuera à veiller à la pérennisation de l'ONG sans compromettre ses autres activités.

Nous lui souhaitons bonne chance.

20 septembre 2007

Septembre 2007

Je rentre de France, du sable encore plein les godasses. J'ai pris en un mois des souvenirs d’avance de ma petite Ana pelotée sur mon cœur.

Si vous glissez un brin d’air suspendu dans la seule syllabe, vous obtenez Ahna, la fleur en japonais. De quoi rimer avec Bopha, la fleur en khmer, l'autre prénom de ma fille, née au pays des enfants sourires.

Et Ana est sourire, celui qui l’accompagne de tous les instants, avec douceur, lors de nos promenades de ces soirs d’août, sur les quais, dans la rue où nous faisions des détours pour allonger cette douceur.

Avec intrigue, quand elle m’écoute, inclinée, du regard de ses premiers pourquoi, avec gourmandise, le visage chocolaté, jusqu’au tonitruant « MON PAPA » qui illumine ses petits points serrés.

J’ai bien mis une semaine à me recaler à coup de sieste sur le fuseau des planches du parquet. Le poids du toit tout entier pesant sur mes paupières, je ferme les yeux. Pareil à un gosse qui s’abandonne à son imagination, Ana bondissait dans mes rêves.

Dehors la plainte sourde d’une coco qui tombe sur la terre battue, parcourt la cour et clôture la sieste. Une bombe ! Non c’est un porte-bonheur, vite un voeu à réaliser.

J’ai repris la route qui me mène à Angkor Vat, sous le vent et la pluie de septembre, Ana respire en moi, je lui souris en silence.

Mon travail du moment est au Baray. Immense réservoir d’eau, de huit kilomètres sur deux. Même pas une montagne, un recoin de vallée, un fond de cul sac pour y créer un joli bassin. Ici tout est artificiel, une digue de plus de 10m de haut dessine un quadrilatère parfait de plus de 20 kilomètres de périmètre. Vu du ciel c’est le plus grand miroir que je connaisse.

Dix siècles que cette piscine géante, qu’une princesse un tantinet capricieuse avait commandée, à son papa roitelet, pour son croco fétiche et adoré – tout ça pour ce faire ensuite boustiffailler toute crue, contribue à l’irrigation des rizières de tout le sud l’ouest d’Angkor.

Quelques pirogues sont suspendues entre ciel et eau. A l’arrière de chaque bateau, une jeune fille, belle et longue, les yeux fixés droit devant, danse d’un pas chassé, sur le balancier qui godille. Un deux, un deux trois, un deux, passe d’un pied à l’autre, un temps de suspension, la courbe rebondie, l’allure est cadencée, le temps absent, le mouvement perpétuel, l’horizon infini.

Je m assoie sur la berge et repense il y a quinze ans déjà, au temps des derniers khmers rouges, je travaillais dans la foret d’Angkor Thom. La lumière rouge du soir, le murmure des ouvriers qui s’enfonçait dans les allées, c’était comme l’âme du temple.

Les gars venaient au boulot à moitié nu, manquant de tout, tremblant de fièvre et de faim mais bravant l’inconnu chaque jour que Dieu fasse, ces hommes là, cuirassés d’une volonté indomptable, repartaient, après huit heures de pioche, biner leur fond de rizière. Je revois Kim Soum, chef de village tatoué jusqu’à l’os, dépenaillé mais marchant d’un pas régulier et puissant, le visage hermétique mais serein. Etait-il possible de savoir, en l’espace d’un regard, que l’on ne pourra plus respirer sans le souffle de ces visages. C’est de ce temps, de ce monde ou les pauvres vont à pied et où le sang se mêle de poussière et de sueur, que j’ai puisé mon idée de revenir… et les idées ont des ailes et nul ne peut les interdire.

Hier au retour du chantier à l’heure où les arbres jouent avec le soleil ou l’air redevient léger ou il y a de la bonne humeur je suis tombé en panne de moto… Là ne pas se laisser aveugler par la haine, respecter sa brave et vieille monture, comprendre la raison de cette énième panne en juste quelques jours, ne pas se jeter dans le canal...Après cinq bonnes minutes d’expertise, en bon garagiste que je ne suis pas, j’étais fort de constater que j’avais une nouvelle fois hérité du statut de grosse palourde mazoutée. La bougie, le carbu, le machin là qui pendouille, bref j’y est passé un pan entier du manuel des castors junior et tout c’est traduit par en une belle et bonne poussette. Quelques cent mètres plus loin les quatre planches d’un modeste estaminet on servit de refuge à ma moto pour la nuit.

Sur le sol en latérite, une petite fille avait tracé une marelle, elle sautait comme une sarcelle. Son visage était doux, son rire vibrait comme le vent. L’orage éclata, un rideau de flotte s’abattit sous le soleil. Patatras, la sarcelle glisse et s’emberlificote les échasses… Déjà les larmes déguisées en pluie ruissellent sur les joues. Je prends la main de la petite fille dans la mienne et comme dans un bonheur silencieux, impossible à écrire, juste à partager, je sens ses grands yeux s’apaiser. En quelques secondes, sa maman est apparue les bras écartés, campée d’un large sourire détrempé au milieu du champ de boue. Elle appelle son bout de chou qui d’un bon se redresse, retrousse ses pommettes jusqu’aux oreilles et rejoint sa maman de tout la force de ses jambes, le coeur battant à grands coups d’amour.

D’un signe de la main, du genre éventail battant un peu fraîcheur, on se quitte. Je reprends mon chemin jusqu’à tomber sur un petit garçon qui attend sur le bas-côté. Je m’arrête et échange quelques mots. C’est alors qu’il m’apprend fièrement que son papa était arroseur de route.

Quelques secondes plus tard le camion citerne arroseur s’arrête prendre le fiston. Trois mots, un bond et hop me voila de retour en ville.

Une chaleur nue, floue qui monte de la terre, on s’enfonce dans la nuit.

Eric Llopis

11 août 2007

Bannière et charte graphique

Nous tenons particulièrement à remercier Marie-Pierre Benedetti qui en plus de son travail à l'Apsara nous a préparé la charte graphique de l'ONG que vous retrouverez sur tous nos documents de com ainsi que la bannière de notre site.

Pour la remercier, nous l'avons invité à dîner dans l'un des meilleurs restaurants de Siem Reap où le chef nous avait spécialement préparé un merveilleux repas dont des St Jacques sur une brandade de crabe et une sauce aux crevettes.

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Photo Anne Rolland

10 août 2007

Sophie Hay

Sophie Hay succède à Charles-Henri Fort, qui avait rejoint l’ONG Anakot Angkor au mois de janvier 2007. Charles-Henri est diplômé du Mastère Spécialisé Management Stratégique du Développement Durable au CERAM de Sophia-Antipolis. Il a travaillé plusieurs années dans l’industrie chimique et automobile en France en tant que responsable commercial. Il a dernièrement participé au développement de la démarche de Haute Qualité Environnementale dans le groupe français de Bâtiment et Travaux Publics Cari.

"Quelques mots pour faire partager mon expérience au sein d'Anakot Angkor. Arrivée en juin 2007 pour mon stage de fin d'étude, je suis chargée du développement commercial et j'assiste Anne, notre chef de projet.
Franco-cambodgienne, je découvre le Royaume du sourire. Souhaitant être utile et avoir un échange réel avec le pays, je participe à l'action d'Anakot Angkor. De formation juriste internationaliste, ma mission au sein de l'ONG s'étend à l'identification des règles juridiques en rapport avec notre activité, plus particulièrement, la définition des règles du commerce international."

Sophie est actuellement étudiante en Droit de l'entreprise et gestion du patrimoine, mention affaires internationales, spécialité Asie pacifique à l'université de La Rochelle.

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10 août 2007

Août 2007

C’est l’été, enfin un été sans la peste pulmobubonique comme je l'appelle. Vous savez ce truc qui tombe toujours bien veille de grandes vacances.

Il y a 2 ans l’Ambass, nous avait consigné sous 40° à l’ombre à cause de ce bidule, mélange de 2 virus, parti, je ne sais comment de Chine pour rebondir à Hong-kong et zigouiller au passage une centaine d’individus.

Ici au Cambodge aucun cas répertorié ! Le virus se propage par les crachas et postillons et en plus en cas de contacts prolongés. Il n y a pas grand risque de chopper ça, comme ça dans la rue, lors d’une partie de badminton, lors d’un dîner au chandelle, tout juste lors d’un combat de boxe thaï où vocifère une bande acharnée de parieurs, ou encore plaqué au sol sous la poigne d’une douce masseuse qui vient vous susurrer à l’oreille « et maintenant, vous pouvez vous retourner ».

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Photo Eric Llopis

Bref, tout reste parfaitement non mesurable, nous n’avons pas vécu l’évènement dans le stress. Donc pas de panique en cas d’infos catastrophes, vous pouvez toujours tenter l’aventure au pays du sourire.

Et oui c’est juillet, vous, vous avez, malgré l’accalmie des grèves, les dopés du tour de France.

Pour nous, c’est le calme plat, j’ai zappé le rince col du nouvel Ambass pour le 14. Ceci dit, plutôt sympa le nouvel Ambass, franc, précis, qui capte même un tantinet trop vite.

Oui donc ! Rien comme grandes nouvelles. Même pas un saccage de l’ambassade de Thaïlande dans la capitale Phnompenhoise à se mettre sous la dent. Vous ne vous souvenez pas de ce malheureux et stupide évènement !

Les frontières se sont fermées, les blablas diplomatiques suspendus, bref tout ça est une histoire politique préélectoral montée semble t-il de toute pièce. En résumé et de manière imagée : une actrice thaïe a voulu jouer à Madonna en montrant ces fesses à une cohorte de khmers, qu’elle a traité de trou duc.

Résultat, les autorités ont crié au scandale, puis ont été débordées par des milliers de khmers décérébrés touchés au plus profond de leur nationalisme primaire. Ca a bardé.

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Photo Eric Llopis

Voilà, c’est l’été, qui avance à toute trombe d’eau: J’ai repris le travail de prospection en forêt, la pluie lumineuse et démesurée qui s’abat, les godasses transformées en enclumes, la barbe mal rasée qui picote le mal séché.

Les filles, les chants, les rires, les frimousses ficelées, comme des oeufs de Pâques, par les kramas bariolés, font la trace en forêt.

Les fourmis rouges qui tombent des arbres, glissent et grouillent sous la chemise, planche à fakir qui mord comme des piques à tapas ; Ne pas lâcher prise sur la mire, la truelle, ou le coup-coup. L’habitude nous gagne, les morsures sont progressivement accompagnées de claques désordonnées. C’est tout le corps qui s’en va rythmer l’appel de la forêt d’une danse-saint-guy.

Le sol de la forêt jonché des troncs et racines coupés et dressés comme des piques, contribue à endiabler le pas de danse d’une eurythmie baroque ; Rester calme, ne pas jurer, ne pas vouloir tout de suite imiter la Castafiore, mettre un pied devant l’autre, ne penser qu’aux sourires des filles.

Ce sourire sur des lèvres rebondies et légèrement entrouvertes, une moue d’invitation fragile, le regard collé juste sous l'horizon de la bordure du bibi à demi incliné, pour faire semblant de voir sans être vu .

Cri qui monte sous le rideau d’eau plombée, une des délicieuses frimousse vient de glisser coup-coup en sabre à charge, sur une espèce de gros crapaud buffle, adieu veau, vache, cochon, couvée... sifflement dans l’air, schiiii... claquement roc et précis...schtouuuu... de rage le futur prince décapité n’est plus.

Un soir en rentrant du chantier, je quitte le groupe et la route des temples pour passer à l’école du village, ou les trois enfants dont je suis tuteur, vont bientôt arrêter l’école. Ce soir, c’est le dernier jour de classe.

J’ai rendez-vous avec la maîtresse pour allonger de quelques dollars le cours de leçons supplémentaires. Je pose la moto à l’entrée et j’avance dans la cour de l’école ; c’est un long silence, puis le vent monte le son dans l’embrasure de la fenêtre de classe, qui à chaque pas grossie. Je m’accoude au rebord de la fenêtre et je distingue dans le brouhaha, mes trois chipies, qui au beau milieu, mènent la foire. La porte s’ouvre, les gosses restent pétrifiés, le prof est arrivé.

Un autre jour, de retour par Angkor Thom, je croise au pied du Baphum, impressionnant puzzle en trois D, La Pièce Montée des missions de restauration française à l’étranger, Rithy Panh, qui tourne son certain regard sur les khmers. La rencontre est cordiale, l’homme est plutôt sympa, il se souvenait de mon courrier et de mon projet de film. On doit souper la semaine prochaine ensemble.

Virée au Kulen, samedi, hier après midi, avec mon copain JB histoire de retrouver la trace d’ateliers de potiers perdus au fond de la jungle. La présence des mines nous a cantonné sur les chemins étroits. On ne peut pas dire qu’on se sentait tout à coup très à l'aise. On a quand même retrouvé le site. Sous la végétation grouillante des tombereaux de tessons de grès dévalent la colline. Certainement que les fours sont enfouis dessous.

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Retour en moto par des chemins étroits, bacs à sable, marécages, ponts éventrés, deux crevaisons en cadeaux et une arrivée nocturne, crotté et épuisé...

Aujourd’hui, c’est dimanche. Heureux de croiser ces quelques mots pour vous. Mais je dois vous quitter, en réalité faut même que j’me grouille car ce soir je fais casse croûte à la maison. Et oui les copains de retour de France ont glissé dans la malle, fromages et vins rouges. Imaginez les copains qui attendent en rêvant de poivrons grillés, croûte aux morilles, seiches à la plancha, côte de bœuf, jambon à l’échalote, magrets de canard, pommes sautées, mont d’or, malaga, baba au rhum : Ha ! le Baba au Rhum : cette glaçure pulpeuse, fluide et caramélisée, qui va coller aux lèvres, cette cuiller qui s’enfonce avant de couper la mousse rebondie comme un canapé, c’est le bonheur du baba au rhum.

Faut que j’me grouille donc car figurez vous que si pour le fromage ce ne sont pas des fortiches, les copains khmers de la soirée, attendent eux aussi le saucisson avec impatience. Et puis côté pinard, c’est pas les derniers non plus.

Eric Llopis

18 juillet 2007

Yam Djé

Il y a Yam Djé, espiègle papa d'une famille nombreuse de paysans, toujours en train de courir d'un point à l'autre des rizières et qui nous invite à une balade au champ entre eau et lumière.

Exception du jour, de bon matin, Dje, court pour une tâche absurde et non élémentaire. Il cherche à réparer son instrument à corde, en vue d'un cadeau musical. Croise son fils, en haut d'un palmier, son autre fils qui a perdu son troupeau de vaches - essoufflé, le petit bonhomme allonge sa foulée et peste la larme à l'œil contre son troupeau, foutues vaches !, elles ont dû filer dans la forêt, y a des jours ! Pas facile de choisir entre les garder à l'œil ou jouer avec ses copains.

Un autre fils qui laboure, un autre qui fait des pièges à grillons… et le reste de la famille à la rizière – plongées, pieds nus sur ce vaste miroir cloisonné, leurs silhouettes, sous la braise du soleil, tremblotent comme des mirages, accomplissent diverses tâches autour et dans la maison, dont la préparation et la cuisson du gâteau de riz à la banane.

Djé, c’est aussi la carrure d’un futur chef du village. L’homme de la terre qui n’a pas eu le temps de liane en liane de traîner une jeunesse boutonneuse prout prout.

Djé, c’est l’honneur des khmers. L’antithèse des nantis corrompus, effrayés à l’idée de casser leurs ongles endimanchés, de salir leurs menottes surmontées de bagouse ou de risquer de développer un soupçon de muscle au biceps.

Djé, c’est un mélange d’homme courage et de monsieur trouve tout, capable après une journée arquée sous le labeur de la rizière, de débouler à la maison et me proposer une solution pour la pause du nouveau chenaux d’alimentation de la fosse septique, l’ancien ayant rendu l’âme par un surcroît additionnel de matière pondérable.

Djé, c’est aussi mon ami khmer, un vrai. A l'heure où fond le soleil sur les lèvres gourmandes qui invitent à prendre un long drink alcoolisé, l'orage chaud, dru et vertical sert ces gouttes de mousson tropicale dans un long pschitt, c'est l'heure entre sueur et rincée, ça dégouline le long du cou, des bras, partout ! Pas le temps d'avoir pied au fond d'son verre... On se réfugie dans un troquet du coin pour se sécher et un long drink, un! Mouy mouy éclate de rire Djé.

Nous sommes servis par deux jeunes filles en habit de Miss Monde robe de soirée avec écharpe colorée, lauréates d'un concours de beauté imaginaire... Leur travail de serveuse dans un karaoké, c'est de s'attabler avec des clients et faire semblant de boire, de rire et de manger... elles assurent un service diligent pour qu'ils les oublient en s'oubliant.
Ici, se prépare le gros de la soirée, où tout le beau monde ira d'sa chansonnette ; c'est déjà une catastrophe occidentale, mais dans sa version asiatique c'est une apocalypse.

Même dans le trou du cul du monde, du lever au coucher du soleil, il y a toujours un baraquement de quatre planches, où braillent et s'égosillent des slows larmoyants, des rocks aigus et acidulés, et d'la techno thaïe.

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Photo Eric Llopis

Avec Djé, c’est les rires, déjà lors de nos premières rencontres où nous correspondions que par pantomime nous riions comme des tordus, là quelques blagues de comptoir et le bonheur des mots sur l’absurdité des hommes ! On se quitte ; On s’embrasse.

Djé c’est l’histoire sans fin, le voilà disparaissant dans la pénombre survenue, au trousse de son frère Yam It, qu’il seconde la nuit, sur le site d'Angkor. Ce soir, certes il monte la garde contre les pilleurs mais il y a aussi la rencontre avec les esprits.

Autour d'un feu, Djé s'improvisera joueur de guimbarde. Ils se raconteront quelques contes terrifiants ; au moindre bruit, ils sursauteront tous de frayeur, glacés sous la pleine lune qui grandit, dans les bruits de la nuit et la silhouette mystérieuse des temples.

Djé c’est aussi celui qui me donne la raison de la colère, contre la cupidité des hommes, pire celle de nos semblables.

Djé c’est l’image de l’homme spolié de sa terre.

Djé c’est l’identité khmère ravagée. Mais dans Yam Djé, malgré la pauvreté et après les tourments de la guerre, il y a l’éternel sourire des hommes et des femmes du soleil levant.

Djé avec sa tronche et sa clope à la Marlon Brando, c’est une balade en hommage aux êtres qui ont la force de leur naïveté, de leur patience, le bon sens de la terre. Djé c’est notre fierté, celle de l’avoir comme président.

Eric Llopis

13 juillet 2007

Présentation de l'ONG

L’ONG a pour vocation la revalorisation du territoire angkorien en associant une terre et la population villageoise du site avec une économie pérenne.

Le dynamisme de la région d’Angkor - Siem Reap provient du patrimoine archéologique d'Angkor et de l’attrait irrésistible qu’il exerce sur les touristes de tous horizons.

Toutefois, les conditions d'un développement soutenu et durable du site archéologique, de la ville et de sa région, restent encore entièrement à définir.

Il est important de noter que les projets de l'ONG ont pour volonté d’aller vers une structure artisanale de formation et de production mais également de développer une activité qui pourra gérer les questions de trésorerie et de finances à l’échelle humaine. En d’autres termes, avoir la capacité de s'ouvrir sur des marchés nouveaux sans abâtardir la qualité de la production.

Ces populations, avec lesquelles les archéologues travaillent depuis plus de huit ans, sur les sites archéologiques d’Angkor, souhaitent être soutenues dans le cadre de projets originaux, attractifs, artisanaux, traditionnels et, à long terme, des projets conjuguant « Patrimoine et Développement ».

L'ONG souhaite soutenir des actions d’aide à ces populations défavorisées dans un contexte dynamique, c’est-à-dire sur des terres où la population villageoise a, depuis la fin du génocide et l'occupation vietnamienne, fait preuve de courage et d’initiative en cherchant à élargir ses activités au travers d’une économie locale complémentaire.

Une attention toute particulière sera portée sur le rôle que joueront les femmes. Leur statut familial les désigne idéalement pour travailler dans le cadre d’une économie artisanale de proximité et cela dans des conditions autrement plus dignes et valorisantes que le rôle de manœuvre dans lequel elles sont trop souvent cantonnées. Un suivi sanitaire, médical et social est prévu dans ce contexte.

Du concept à sa réalisation nous souhaitons développer ces projets dans un esprit de transfert de compétences associant à ces objectifs la formation d’un métier en adéquation avec le lieu.

Un effort tout particulier sera consacré à pérenniser l’action avec, comme perspective, un territoire angkorien en pleine évolution.

12 juillet 2007

Création de l'ONG

Malgré le développement des hôtels de luxe, l'arrivée inexorable des voitures et du plastique, de quelques bars pour expatriés, la grâce et la simplicité des khmers sont toujours présentes.

Le pays où règnent dans les temples, parfois encore enfouis dans la forêt, les dieux hindous et le Bouddha, n'a pas perdu son parfum d'éternité.

Malgré l'atrocité qu'il a connue, le Cambodge reste fascinant. C'est d'ailleurs le charme de l'Asie où tout est mystérieux, parfois incompréhensible, où le danger est violent, inattendu, mais où tout le reste est un terrain de jeu permanent.
Quelle chance quand on travaille avec les khmers, de quitter la petite ville de Siem Reap et de courir dans les rizières, lumineuses, baignées de soleil verdoyant. Après la mousson, tout est lumière, l'eau est partout, des grandes ondes molles et boueuses du lac sur lesquelles flottent les villages de pêcheurs à la forêt noyée sous la végétation.

Il y a du bonheur à rouler entre les buffles, les palmiers à sucre, les maisons sur pilotis, de lever les canards sauvages.
Les garçons et les filles ont de larges sourires. On fait la fête avec trois fois rien, quelques poissons séchés, serpents ou mygales grillés, soupe de fourmis, être heureux n'a pas de prix.

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Photo Eric Llopis

A la saison où l'on coupe le riz, les enfants jouent à cache-cache dans les rizières. Ils se marrent de l'étranger qui passe, grand, petit, pâle ou barbu.

Si la forêt recule toujours chaque année, le monde atroce des mines aussi, et l'on redécouvre un univers plein de bruit d'animaux colorés, de singes coléreux et farceurs, de perroquets qui jacassent, de cigales qui sifflent de manière assourdissante.

Les énormes fromagers blancs digèrent la pierre encastrée des temples. Leurs racines rampent autour des colonnes des portiques.

Là-bas, sur la route de la digue, il y a le va-et-vient de la multitude de vélo, des marchands, des bandits, entre la ville et les bateaux d'hier qui remontent encore le lac dans une atmosphère de décomposition et de fièvre.

Face à une condition humaine laminée, le comportement parfois déroutant de ces hommes et de ces femmes, entre clin d'œil humoristique et exemplarité, vous surprendra aussi.

Malgré la pauvreté et après les tourments de la guerre, il y a au soleil levant des hommes et des femmes qui ont toujours le sourire. Certes ces gens ne font pas la fête toute la nuit. Ici, ils sont plus fourmis et moins cigales, c'est différent d’ailleurs, c'est un autre bonheur.

Voila Anakot Angkor est né de tout cela. Comme une évidence interrogative : Difficile d’expliquer ce qui vous pousse un jour à prendre votre courage à deux mains.

Au delà de la nécessité d’entreprendre certainement d’un peu de cette responsabilité qui envahit l’amateur éclairé ou le professionnel.

Parce que plus jeunes, on a ailleurs rencontré cette nécessité de vibrer et mordre à l'engouement qui renaît. Une sorte d’auto régénérescence.

Une sorte de devoir qu’impose l’attachement au patrimoine angkorien, au partage du quotidien khmer.
Comme si la participation à la rencontre, au partage, à la reconstruction vous parcourez du désir de contribuerait à raviver la dynamique de vie, mise à sac par la guerre.

Certainement parce qu’il reste chez les khmers ce désir immuable de sourire à la vie et de partager les émotions.
Parce que nous sommes un groupe de femmes et d’homme qui ont le goût de l’aventure humaine motivée principalement par le lien qui nous unit aux communautés villageoises autour d’Angkor, avec qui nous travaillons et qui nous connaissent depuis maintenant depuis plusieurs années.

Parce que leur énergie à survivre nous a donné une leçon d’humilité dont nous sommes aujourd’hui encore imprégnés. Cette leçon a forgé en nous la nécessité d’intervenir dans le processus de mise en route de projet conçu dans un esprit d’aide au développement.

Eric Llopis

11 juillet 2007

Eric Llopis, co-fondateur

Eric Llopis est arrivé au Cambodge en 1995 pour une mission archéologique sur les Temples d’Angkor. Pris de passion pour ce pays, il décida de créer l’ONG Anakot Angkor, en 2005, ayant pour but de promouvoir des projets de développement.

Eric Llopis est diplômé du master en Archéologie Antique de l’Université de Besançon en France. Il est aujourd’hui Chargé d’Etudes à l’INRAP. Il a également dirigé de nombreux chantiers de fouilles à l’étranger, au Moyen-Orient, en Afrique et en Asie. Il est actuellement Conseiller scientifique et technique du programme FSP Angkor (coopération entre Ambassade de France, Inrap et Autorité APSARA)   

« J’aime parler de la mer, de mes virées transatlantiques, des longs quarts de nuit, de mes missions en archéologie, des gestes du potier, de la haut dans le ciel. J’aime raconter la méditerranée, ma terre d’Afrique, le désert soudanais, mais aussi la foret profonde, la rizière, les temples,…je suis un affreux gourmand, de tout … On me dit passionné, oui j’aime faire partager ce que j’aime, mais j’ai peur d’en être impossible à vivre, et puis j’exaspère avec mes  mille idées à la minute.

Le jour où j’ai pénétré le site d’Angkor Thom, j’ai découvert avec fascination le peuple, les paysages, la sensualité, la moiteur…J’ai goûté ce subtil mélange de tranches de vie sur fond de mémoire. Les gens d’ici m’ont pris aux tripes, leur sourire, la fureur de vivre, je ne sais les raisons d’une adoption, j’en ai souvent oublié les vieilles pierres de mon métier. Douze ans plus tard, aujourd’hui, rempli de rebonds africains et orientaux, c’est un nouveau long court qui me fixe au pays des khmers ».

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